Ce qu’il est convenu d’appeler « les activités » connait de nos jours un développement certain dans le champ de la psychiatrie. Les médiations dites « artistiques » ou « créatrices » se développent à grand pas sans que les questions liées au devenir des objets aient toujours été traitées sur le fond.
Propulsée essentiellement pas le monde intellectuel l'idée de proposer des activités manuelles aux patients fait son chemin. Ce qu’il est convenu d’appeler : « les activités » connait de nos jours un développement certain dans le champ de la psychiatrie après un intermède orienté par la chasse aux clubs de la psychiatrie institutionnelle. Les médiations dites : « artistiques » ou « créatrices » se développent à grand pas sans que les questions liées au devenir des objets aient toujours été traitées sur le fond. Ceux-ci parfois s’amoncellent ou pire sont exposés ou détruits. L’objet est entré dans le domaine du soin comme "médiateur thérapeutique" à l’image du médicament et il devient rare d’imaginer une relation sans objet. Le psychanalyste verrait ici peut-être la mise en scène d’un fantasme plus ou moins pervers où l’objet viendrait pigmenter la relation.
Sans nier l'intérêt de l’introduction d’un peu de comportement dans la thérapie il convient de souligner les travers de ces propositions.
L’enfer étant pavé de bonnes intentions, l’idée de proposer des activités dans le champ du soin est susceptible d’entrer en complicité avec ce stéréotype péjoratif selon lequel les personnes souffrant de troubles mentaux seraient paresseuses. Comme le rappelle Olivier Canceil, psychiatre à l'établissement public de santé Maison Blanche à Paris au sujet de la schizophrénie : « Malheureusement, on peut alors prendre cette maladie pour de la paresse ». Le « thérapeutique » viendrait ici s’accoupler avec le discours du maître avec le souci contre-transférentiel de mettre « le patient au travail ».
Nous devons faire preuve de clairvoyance car la difficulté initiale pour faire admettre des activités thérapeutiques s’est, en certains lieux, retournée en engouement depuis les manœuvres de séduction liées, entre autres, aux dites : « démarches qualité ». Un établissement peut parfois utiliser cette image de marque tonique et dynamique pour se trouver en phase avec les préjugés du public. On aboutit alors à une sorte de harcèlement activiste visant le personnel et les patients et ce au service du déni. Si nous savons que l’acte de déni s’oppose à toute forme de symbolisation les pires retours dans le Réel sont à craindre. Doit-on continuer à supporter que certains lieux de soin n’hésitent pas à exposer la production intime des patients pour redorer le blason de leur établissement et s’attirer les bonnes grâce du financeur et des familles ?
On ne peut glisser sous le manteau la question du devenir de l’objet car il en va de l’éthique du soin. On ne peut pas laisser produire un objet sans avoir « pensé » son devenir. Pour notre part nous avons opté pour une dimension strictement art-thérapeutique où le sujet ne risque jamais de s’effacer derrière l’objet dans la mesure où celui-ci est résolument éphémère.
Jean-Pierre ROYOL
Docteur en psychologie clinique , Fondateur de PROFAC , Formation et recherche en art-thérapie
Publié le 23 mars 2018 – Santé Mentale
https://www.artherapie.com
Propulsée essentiellement pas le monde intellectuel l'idée de proposer des activités manuelles aux patients fait son chemin. Ce qu’il est convenu d’appeler : « les activités » connait de nos jours un développement certain dans le champ de la psychiatrie après un intermède orienté par la chasse aux clubs de la psychiatrie institutionnelle. Les médiations dites : « artistiques » ou « créatrices » se développent à grand pas sans que les questions liées au devenir des objets aient toujours été traitées sur le fond. Ceux-ci parfois s’amoncellent ou pire sont exposés ou détruits. L’objet est entré dans le domaine du soin comme "médiateur thérapeutique" à l’image du médicament et il devient rare d’imaginer une relation sans objet. Le psychanalyste verrait ici peut-être la mise en scène d’un fantasme plus ou moins pervers où l’objet viendrait pigmenter la relation.
Sans nier l'intérêt de l’introduction d’un peu de comportement dans la thérapie il convient de souligner les travers de ces propositions.
L’enfer étant pavé de bonnes intentions, l’idée de proposer des activités dans le champ du soin est susceptible d’entrer en complicité avec ce stéréotype péjoratif selon lequel les personnes souffrant de troubles mentaux seraient paresseuses. Comme le rappelle Olivier Canceil, psychiatre à l'établissement public de santé Maison Blanche à Paris au sujet de la schizophrénie : « Malheureusement, on peut alors prendre cette maladie pour de la paresse ». Le « thérapeutique » viendrait ici s’accoupler avec le discours du maître avec le souci contre-transférentiel de mettre « le patient au travail ».
Nous devons faire preuve de clairvoyance car la difficulté initiale pour faire admettre des activités thérapeutiques s’est, en certains lieux, retournée en engouement depuis les manœuvres de séduction liées, entre autres, aux dites : « démarches qualité ». Un établissement peut parfois utiliser cette image de marque tonique et dynamique pour se trouver en phase avec les préjugés du public. On aboutit alors à une sorte de harcèlement activiste visant le personnel et les patients et ce au service du déni. Si nous savons que l’acte de déni s’oppose à toute forme de symbolisation les pires retours dans le Réel sont à craindre. Doit-on continuer à supporter que certains lieux de soin n’hésitent pas à exposer la production intime des patients pour redorer le blason de leur établissement et s’attirer les bonnes grâce du financeur et des familles ?
On ne peut glisser sous le manteau la question du devenir de l’objet car il en va de l’éthique du soin. On ne peut pas laisser produire un objet sans avoir « pensé » son devenir. Pour notre part nous avons opté pour une dimension strictement art-thérapeutique où le sujet ne risque jamais de s’effacer derrière l’objet dans la mesure où celui-ci est résolument éphémère.
Jean-Pierre ROYOL
Docteur en psychologie clinique , Fondateur de PROFAC , Formation et recherche en art-thérapie
Publié le 23 mars 2018 – Santé Mentale
https://www.artherapie.com